samedi 27 juillet 2013

CONNAISSEZ-VOUS FERRE ?




Comme un clin d’œil au passé, L. Ferré disparu le 14/07/1993. Révolutionnaire, il le fut dans ses paroles, dans ses chansons, acerbes, dérangeantes, déroutantes ou émotives.

Résumer 77 ans de vie n’est pas possible, surtout la sienne qui fut très riche en événements et en rebondissements.

Ce diplômé de Sciences-Po rencontra les plus grands : Piaf, Brel, Brassens, Trenet et bien d’autres. Façonné depuis l’âge de 6 ans au solfège et à l’harmonie, sa discographie montre l’étendue de son talent. Il composa avec E. Marnay la chanson les amants de Paris pour Edith Piaf.

Par la suite, avec un travail acharné, il deviendra l’auteur de plus d’une centaine de chansons. Léo Ferré fut épris de poésie. Tout d’abord de Baudelaire dont il mit ses Fleurs du mal en musique, d’Aragon mais aussi de Rimbaud avec « une saison en enfer ».

Ses textes vindicatifs, bousculant les règles bien établies, nous ont fait découvrir une autre facette de sa personnalité : l’anarchisme. Il l’a revendiqué haut et fort même si, par moments, et avec la même hargne, il mettait de l’émotivité dans ses textes. L’émotion de titres comme « la mémoire et la mer », « la vie d’artiste », « jolie môme » ou « c’est extra » et la revendication de chansons comme « les anarchistes » ou « ni dieu ni maitre » sont restés dans les mémoires.

Dans sa vie privée Léo Ferré se maria deux fois. Amoureux des animaux, il acheta un château vétuste avec un grand parc boisé. Là-bas il installa une mini arche de Noé dont un cochon et deux guenons. Il baptisa l’une d’elle Pépée. Cette dernière fut très proche de son maitre au point d’imiter ses moindres faits et gestes.
Hélas, en 1968, alors que Ferré est à Paris, Pépée se blesse au château et est touchée par la gangrène. L’épouse de Léo, jalouse de l’attachement de son mari à l’animal, décide de la faire abattre ainsi que l’autre guenon et le cochon baba. Par ce geste, elle signe la fin de son histoire avec Léo. Dans la nuit même Ferré écrit un de ses plus beaux textes en hommage à sa guenon. Extrait : « je voudrais avoir les mains de la mort, pépée, et puis les yeux, et puis le cœur, et m’en venir coucher chez toi ça changerait rien à mon décor on couche toujours avec des morts… »

Il se remariera et ira vivre en Italie. Ses textes resteront ravageurs, marquants, percutants. Comment ne pas connaitre « avec le temps », sublime chanson reprise par Dalida avec la permission de Léo Ferré qui trouva la reprise bouleversante et authentique.

Bête de scène, il exprimait par le texte, par des regards expressifs et une gestuelle, les couleurs de ses chansons. L. Ferré était un roc, un monument de la chanson française. Il invectivait, dérangeait, envoyait bouler, passant de la réflexion à l’émotion. Il n’a jamais voulu être enfermé dans un moule. Il était lui : nous l’aimions ou le détestions. A la fin de sa vie il arborait une crinière blanche comme pour nous dire : vous n’oublierez pas mon prénom Léonin (Lion = Léo).

Puis dans un dernier salut, une dernière facétie, il mourut le 14 juillet, jour de la fête nationale. Tout au long de sa vie, il a été un feu d’artifice de mots, de rage, de violence parfois amère, de larmes mais surtout de liberté. Nous reste aujourd’hui ses textes et c’est avec l’un d’eux que je vous laisse à la méditation, au plaisir de la poésie, selon Ferré, celle qui touche le plus dur des cœurs.




P/L








LORSQUE TU ME LIRAS – LEO FERRE

Lorsque tu me liras, je te regarderai dans le pare-brise,
Tu viendras à moi, tout entière, comme la route,
Lorsque tu me liras, la maison sera silencieuse, et mon silence à moi te remplira tout entière aussi.
Avec toi, dans toi, je ne suis jamais silencieux, c'est une musique très douce que je t'apporte...
Quant à toi, tu verses au plus profond de ma solitude, cette joie triste d'être, cet amour que, jour après jour, nous bâtissons, en dépit des autres, en dépit de cette prison où nous nous sommes mis, en dépit des larmes que nous pleurons chacun dans notre coin, mais présents l'un à l'autre...

Je te voyais, ces jours ci, dans la lande, là-bas, où tu sais...
Je t'y voyais bouger, à peine te pencher vers cette terre que nous aimons bien tous les deux, et tu te prosternais
à demi, comme une madone, et je n'étais pas là... ni toi...
Ce que je voyais c'était mon rêve...

Ne pas te voir plus que je ne te vois...
Je me demande la dette qu'on me fait ainsi payer.
Pourquoi? L'amour est triste, bien sûr, mais c'est difficile, au bout du compte, difficile...

Dans mes bras, quand tu t'en vas longtemps vers les étoiles et que tu me demandes de t'y laisser encore... encore...
Je suis bien; c'est le printemps, tout recommence, tout fleurit, et tu fleuriras aussi de moi, je te le promets.

La patience, c'est notre grande vertu, c'est notre drame aussi.
Un jour nous ne serons plus patients.
Alors, tout s'éclairera, et nous dormirons longtemps, et nous jouirons comme des enfants.
Tu m'as refait enfant; j'ai devant moi des tas de projets de bonheur...
Mais maintenant, tout est arrêté dans ma prison.
J'attends que l'heure sonne...
Je me perds dans toi, tout à fait.

Je t'aime, Christie, je t'aime.


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